Interview de Marcel Caens, Roger Delmotte et Pierre Pollin par Thierry Caens, réalisée le 28 juin 2005 à Brochon (Côte d’Or)

 

THIERRY CAENS.— La première fois que vous avez entendu parler d’Eugène Foveau ?
ROGER DELMOTTE.— À Roubaix en 1944, mon professeur Maurice Leclercq m’ayant conseillé de me présenter au Conservatoire de Paris m’avait dit : «Tu vas rencontrer le Maître Eugène Foveau qui est un grand artiste, soliste à l’Opéra. Tu pourras apprendre beaucoup avec lui.» Pour moi c’était un inconnu car à cette époque nous ignorions même les noms des professeurs, et nous ne croulions pas sous les informations comme aujourd’hui.

 

TC.— Et vous Pierre, quand avez-vous entendu parler de Foveau pour la première fois ?
PIERRE POLLIN.—M. Bellis, mon professeur au Conservatoire de Caen, connaissait Maître Foveau pour lui avoir déjà présenté des élèves. Il nous parlait de lui avec respect et admiration et il m’a accompagné à Paris pour me présenter à lui. Je me souviens aussi avoir entendu quelques enregistrements du Maître sur des stations de radio.
MARCEL CAENS.— Mon père connaissait un musicien de la Garde qui s’appelait Auguste Beghin, qui était cornet solo. Il a dit à mon père « Je présenterai votre fils à M. Foveau ». C’est ainsi que j’ai fait sa connaissance.

 

TC.— Et comment s’est passée la première rencontre ?
PP.—C’était en 1942, j’avais 17 ans. Rien n’était à son goût. J’avais préparé trois concertos : Fête Joyeuse de Dallier, le Concerto de Leboucher et la Légende d’Enesco. Il ne les a pas acceptés et m’a dit de jouer la Légende de l’Armor d’Alexandre Georges. Bien sûr j’ai obéi et j’ai joué ce concerto sans aucun plaisir (aucune virtuosité et dans une tessiture grave qui ne me convenait pas du tout). Et je n’ai pas été reçu en 1942, bien qu’ayant passé le 1er tour. Et puis en 1943 j’ai été admis sans aucun problème (c’était mon tour).
RD.— La Légende de l’Armor était imposée. Pour la seconde épreuve c’était Enesco. Ne connaissant pas cette oeuvre, je me suis demandé comment j’allais m’en sortir.

 

TC.— La Légende d’Enesco n’était jamais jouée en province ?
RD.— Elle n’était pas au répertoire à Roubaix, ni des concours en province. C’était trop difficile.
PP.— Après mon premier Prix à Caen en 1941, M. Bellis m’avait fait connaître et travailler tous les concertos connus à cette époque dont la Légende d’Enesco. Mais on jouait plutôt Guy Ropartz, Pessard, Dallier, Chapuis….


TC.— Et le premier contact avec Foveau ?
MC.— Chez lui, rue Hélène. Il m’a donné beaucoup de conseils. Je n’étais pas passé par un conservatoire de province. Je venais directement de Villedieu dans la Manche. J’ai appris le cornet avec un Monsieur nommé Michel Havard, un homme âgé qui jouait très bien du cornet à la manière ancienne. Il me parlait de gens comme Briens, comme Lachanau. Il était d’ailleurs de cette époque-là. Il m’a vraiment donné de très bons conseils.


TC.— Et à quoi Foveau s’attachait-il particulièrement ?
MC.— Au point de vue de la sonorité et de l’interprétation, j’étais tout à fait dans sa manière à lui, étant donné ce que j’avais appris avec ce Monsieur Beghin, qui était de la même école.


TC.— Quel était le niveau des élèves arrivant chez Foveau ?
PP.— Il fallait savoir jouer les gammes très proprement. En 1943, pendant la guerre, le niveau des élèves était très inégal, avec beaucoup d’écart entre les premiers et les plus faibles.


TC.— Qu’étudiez-vous avec lui ?
PP.— Uniquement Arban, Forestier, Chavannes.
MC.— Les ornements, la propreté et jouer sur le temps.


TC.— Quelle était sa méthode ?
MC.— Le style avant tout, la conduite de l’air.
RD.— Il était très influencé par les chanteurs d’opéra, Georges
Thill par exemple.
PP.— Il y avait deux cours obligatoires par semaine
(normalement trois, mais moi j’habitais en province).
MC.— Il arrêtait l’élève dès que ce n’était pas propre.
PP.— On jouait peu de musique, l’endurance n’était pas
travaillée.
RD.— Pour lui, les élèves ne jouaient jamais assez propre.
PP.— Il ne parlait jamais des problèmes techniques.
RD.— Il fallait être au service de l’interprétation.
PP.— Qualité du son, de l’émission.
MC.— Le respect du legato, notamment dans la 6ème Arban.
PP.— Et d’ailleurs il montrait souvent l’exemple.


TC.— Et quelle était l’ambiance à la classe ?
MC.— Bonne ! C’était du temps de Menardi, Greffin, Mercier qui était à la Musique de l’Air, Marius Raynaud, Gibault… A mon concours en 1939, j’ai eu un second prix, étant à égalité de points avec Greffin ; c’est lui qui fut choisi, au bénéfice de l’âge, c’est normal. C’était un bien pour un mal comme on dirait, parce que cela m’a permis, en rentrant d’Allemagne, de revivre le Conservatoire, de retrouver un petit peu ce que j’avais perdu pendant les années de captivité et
surtout l’occasion de m’enrichir des précieux conseils de Maître Foveau.
RD.— Comment t’es-tu retrouvé captif en Allemagne, tu avais été appelé par le service militaire ?
MC.— Je m’étais engagé pour pouvoir faire mon service dans la musique. Puis la guerre en 1939 a mis fin à toute activité musicale, durant quatre années, puisque je suis resté prisonnier trois ans en Allemagne.
RD.— A ton retour, ce fut un concours de circonstances favorables pour que tu puisses remettre le pied à
l’étrier à la trompette.
MC.— Oui, j’ai été affecté directement à la classe de trompette, celle de cornet ayant été supprimée.
RD.— Oui, puisque Vignal était décédé en 1943.
PP.— Ayant été admis en 1943, nous nous sommes retrouvés ensemble à la classe de Me Foveau et Roger nous a rejoints l’année suivante.
MC.— Cela a été dur les premiers temps pour retrouver un peu de lèvres. Je n’avais pas tellement d’aigu, c’était ma partie faible et mon problème pour jouer Enesco.
RD.— Et les concertos avaient évolué.
MC.— J’ai eu la possibilité de partir au Maroc à l’Orchestre de la Radio Française et de l’Opéra à Rabat. J’y suis resté 8 ans et puis j’ai éprouvé le désir de revenir en France en raison des problèmes de sécurité. J’ai alors rencontré André Amellèr à l’occasion d’une représentation de Tristan et Yseult à l’Opéra de
Paris. Il venait d’être nommé Directeur du Conservatoire de Dijon et m’a conseillé d’être candidat pour le poste de professeur de trompette. J’ai eu la chance d’être reçu et j’ai commencé ma carrière d’enseignant. Cantabile et Scherzetto de P. Gaubert et Légende d’Enesco étaient imposés, Me Foveau faisait partie
du jury et à l’issue du concours il m’a fait quelques commentaires sur ma prestation, entre autres cette réflexion : «J’avais peur que vous soyez devenu province» (j’étais parti de Paris depuis 8 ans).
PP.— Il m’a fait à peu près la même observation lorsqu’en 1956 il a accepté de me recevoir, car je désirais avoir son avis sur mes possibilités du moment. Après 4 ans passés à l’Orchestre de la Radio Française de Tunis, puis 4 ans à Lille (soliste à l’Orchestre de la Radio et professeur à Roubaix) j’ai voulu revenir à Paris à l’occasion du concours organisé pour pourvoir les postes vacants dans les orchestres Parisiens de la R.T.F. Il m’a alors accueilli très amicalement et j’ai beaucoup apprécié les compliments très chaleureux qui ont conclu mon audition (à l’issue du concours j’ai été nommé soliste de l’Orchestre Radio Lyrique).
RD.— Son exigence allait toujours vers la pureté de style. Il faisait beaucoup de réflexions dans ce sens, il voulait absolument que l’on joue comme un grand chanteur d’opéra chante, comme un violon joue. J’ai toujours essayé de transmettre à mes élèves ce principe de base de maîtriser la colonne d’air comme un
violoniste maîtrise son archet (son expression favorite était « l’archet à la corde » : il avait travaillé le violon).
PP.— « L’archet à la corde », c’était son expression.
MC.— Il faisait souvent le parallèle avec le violon.
PP.— Dès mon entrée à la classe en 1943, j'ai éprouvé quelques difficultés pour comprendre exactement ce qu’il désirait entendre. Il donnait beaucoup d’exemples que j’essayais, comme les autres élèves, de reproduire. J'avais un détaché facile, mais il fallait le modifier en fonction de l’interprétation désirée.
Ainsi grâce à ses conseils et à l’écoute attentive, je crois avoir obtenu la maîtrise de toutes les formes d’émission et de détaché. Il m’a appris également à contrôler la sonorité, exigeant une homogénéité parfaite du grave à l’aigu et la maîtrise des nuances et du legato. Quant au style, à l’interprétation, la musicalité, ses exemples étaient parfaits. Ainsi, ce qui alors n’était pour moi, et bien sûr pour d’autres, que de l’imitation s’est transformé ensuite en un style plus personnel mais toujours inspiré de ce que j’avais entendu.
RD.— J’ai eu à corriger l’émission qui était trop pointue, comme jouaient les trompettistes à l’époque, mais je pense que le son était là. J’ai eu beaucoup à apprendre ce qu’était l’interprétation avec mon instrument.


TC.— Donc vous êtes allé jouer votre programme. Qu’avezvous
joué comme concerto ?
PP.— Je lui ai joué l’imposé Gallois-Montbrun / Jolivet /
Tomasi. Les trois enchaînés.

TC.— Et qu’a-t-il dit ?
PP.— Que je pouvais rentrer à Paris et prétendre à un poste
de soliste.
TC.— Est-ce qu’il expliquait comment il jouait ?
RD.— Nous n’avions pas la formation pour comprendre à l’époque. Il ne faut pas l’oublier, nous arrivions avec des explications très sommaires sur la technique de base de l’instrument ! Celui qui jouait bien, c’est parce qu’il respirait correctement et qu’il avait des moyens physiques.
PP.— Ses explications étaient difficilement comprises mais ses exemples étaient toujours remarquables.

TC.— Parce-que lui n’expliquait pas du tout ça ?
RD.— Non. Il n’avait jamais eu de problèmes, jouant si naturellement.


TC.— Et il travaillait beaucoup ?
RD.— Il nous avait dit un jour que par période, chaque matin, il jouait l’Ave Maria de Gounod. Chaque jour il montait la tonalité d’un demi-ton. J’ai eu la chance de l’entendre jouer à la classe. Quelle beauté de son et d’interprétation ! Là il ne craignait pas l’aigu, comme cela le préoccupait à l’Opéra et chez Colonne.
C’était surtout, je crois, la crainte de mal faire devant le public. Sa fierté en aurait souffert.
MC.— Il employait une expression : « Monter la lèvre ». Quand on avait quelque chose d’aigu à jouer, il fallait quelque temps avant de commencer à se « monter la lèvre », c'est-à-dire déplacer la lèvre sur l’embouchure de façon à pouvoir jouer les notes aiguës. Il le précisait par exemple quand il jouait le Brandebourgeois, il était obligé de se « monter la lèvre ».


TC.— Mais c’est quelqu’un qui avait des moyens physiques ?
MC.— Pas extraordinaires. Pas comme Maurice André par exemple.
PP.— Certainement très au-dessus de la moyenne pour l’époque, avant l’évolution du répertoire et l’influence de Sabarich puis de Maurice André.
RD.— Non, cela n’avait rien à voir. Ce n’était pas du tout la même chose…C’était le cornettiste avant d’être le trompettiste. Et le trompettiste qui a toutefois des craintes avec son instrument, enfin qui n’a pas cette liberté du trompettiste qui fonce. On sait très bien que plus on recherche la musicalité, moins on peut se permettre de jouer comme quelqu’un qui n’y pense pas. Il n’y a pas de comparaison. Conscience ou inconscience ?

TC.— Il faut faire des choix.
RD.— On fait un choix et j’ai préféré la trompette au service de la musique. J’étais passé lui dire bonjour trois semaines avant qu’il ne décède. Je devais jouer Jolivet quelque part et j’avais souhaité le lui faire entendre. Il m’a rejoué la cadence. Impeccable ! Mais il m’a dit : « Bon, je n’irai pas plus loin.» Il avait environ 70 ans.


TC.— Et il jouait encore jusqu’à la fin de sa vie ?
RD.— Non, il jouait quelques notes mais exceptionnellement.
PP.— Quand tu es rentré à l’Opéra il y était encore ?
RD.— Oui, nous avons travaillé un an ensemble, en 1951. Je m’en souviens encore, il y avait Jeux d’enfants, avec, à la fin, un petit geste amical sur le genou et un sourire.
PP.— Ca devait être difficile quand même d’être associé au Maître.
RD.— Surtout que je n’avais fait que peu de Grand Orchestre classique. Pour gagner ma vie j’avais beaucoup joué de variétés, de music hall et autres. Heureusement j’avais fait trois mois de saison classique à Cannes et certains concerts chez Oubradous. Cela m’a rendu service. Grâce à Genève, j’avais travaillé d’une autre manière. J’avais préparé le concours avec le Maître et je l’en remercie encore (1er Prix du Concours International de Genève en 1950).

 

Chapitre 2

Pierre : Je pense que son attitude de dureté envers les élèves était un masque et cachait surtout son irritation devant l’impossibilité d’obtenir ce qu’il désirait entendre.

TC : Quels étaient ses rapports avec Sabarich ?
Pierre : Ils étaient très longtemps en concurrence, c’était deux façons de jouer très différentes.
Roger : Sabarich était plus dans les « affaires » (le métier), il faisait plus travailler ses élèves…
Pierre : Sabarich était très gentil avec eux. Un jour il m’a dit « De tous les élèves de Foveau, tu es celui qui a le mieux gardé son style, garde-le… »
Roger : Sabarich admirait Foveau…
Pierre : La pédagogie de Foveau était basée sur une mise à l’épreuve permanente.
Roger : A la Garde, c’était « Maître Foveau », à l’Opéra « Maître Foveau » ! N’oublions pas qu’il y eut deux postes ayant la spécificité de super soliste à cette époque là: c’était Merckel au violon solo et Foveau à la trompette. Comme cela existe encore dans certains orchestres américains : le violon solo et la trompette solo. Pour vous dire le prestige qu’il avait ! Cela le gênait qu’on parle de Sabarich. Avec Adriano ils étaient très amis, ils n’habitaient pas loin l’un de l’autre. Lui était rue Cavalloti, Foveau rue Hélène. Il y a eu beaucoup de monde pour les obsèques de Foveau, sur le coin de La Fourche c’était l’encombrement total.

 

Chapitre 3

TC Qu’est ce qui vous a marqué le plus dans sa façon de faire travailler des élèves qui avaient des problèmes ? C’était possible ?
Roger : A l’époque celui qui avait des problèmes, il essayait de le faire jouer comme celui qui n’en avait pas. Voilà. Il ne faisait pas de distinction.
Pierre : Oui absolument, je crois qu’il accusait l’élève de ne pas faire ce qu’il lui demandait.
Roger : Sa pédagogie était basée sur l’imitation des exemples qu’il nous jouait.
Pierre : Oui, il aimait nous comparer entre nous.
Roger : Il blessait les autres par la comparaison. Ses réflexions, pertinentes, avaient certainement pour but de nous faire réagir.

TC C’était un test pour voir jusqu’où vous pouviez aller ?
Roger : Peut-être. Il était peiné si quelqu’un lui disait par exemple, croyant lui faire plaisir : « J’ai entendu ton élève qui a pris ton poste, il m’a fait penser à toi ». Foveau était triste, il ne supportait pas que l’on puisse le comparer à l’un de ses élèves.


TC: C’était un compliment, et il l’a pris comme une comparaison ?
Roger : Oui. Foveau était heureux de voir les élèves monter mais il ne voulait pas qu’on dise qu’ils étaient arrivés à un niveau permettant la comparaison avec lui.
Pierre : Oui, il était très susceptible ! Je crois qu’il était toujours inquiet, il était très traqueur ! Il n’avait pas peur de la trompette mais du petit incident qui pourrait décevoir le public et surtout ses collègues.
Roger : Adriano me l’a dit de nombreuses fois, d’autres aussi qui avaient travaillé avec lui, tant chez Colonne qu’à l’Opéra : il était traqueur. Il fumait beaucoup et quand il avait un solo à faire le mardi matin à la garde par exemple, la veille il buvait je ne sais combien de litres de tilleul que sa femme préparait. C’est madame Foveau qui m’avait raconté cette anecdote.
Pierre : Il supportait très mal qu’il y ait le moindre petit accroc, même à une répétition, c’était un drame ! Il fallait toujours que ce soit parfait.
Marcel : Il tenait beaucoup à ses « vocalises » et à « l’expression ». Il lui arrivait parfois, d’ailleurs, d’accompagner ses conseils de mots « piquants ».

TC Son exigence vient de là ?
Pierre : Oui, son exigence, c’était déjà pour lui, et d’autant plus pour les élèves. Je crois que sa sévérité masquait en réalité ses sentiments plus complexes pour ses élèves et beaucoup de fierté devant la réussite de certains. Il était d’ailleurs très différent en dehors de la classe et pouvait être amical avec ceux qui lui restaient fidèles (beaucoup) et lui manifestaient leur admiration et leur respect. En 1944, à cause du débarquement, j’ai manqué trois mois de cours, Foveau m’en a voulu…
Marcel : D’ailleurs en 1944 le concours a été avancé au mois de mai; c’est Delvincourt, qui était résistant, qui avait été prévenu…
Roger: C’était un drôle d’homme, Foveau. Pierné à cette époque voulait lui écrire un concerto de trompette. Il a refusé en prétextant que ce serait trop dur et que nerveusement il ne pourrait pas… dommage !

TC Quelle a été l’évolution de la trompette après Foveau ?
Roger : On a beaucoup progressé sur la technique et la résistance…
Pierre : Moi j’ai appris après, à l’orchestre, le volume, la tessiture, tout en essayant de conserver la facilité et la légèreté.
Roger : La facture a évolué, vers la facilité, j’ai toujours l’embouchure de cette époque, je ne pourrais plus la jouer.
Pierre : Ce sont les voyages en Amérique qui ont permis les rencontres et l’influence Américaine.
Roger : J’ai eu la 1ère Trompette Bach (grâce à P. Longinotti vers 1956… ?). Je l’ai jouée à l’Opéra, on m’a dit : « Tiens, on joue du Bugle à l’Opéra … »

Excerpts from an interview of Marcel Caens, Roger Delmotte and Pierre Pollin, in Brochon (Côte d’Or) on 28 June 2006, by Thierry Caens.


Thierry Caens: When did you first hear about Eugène Foveau?
Roger Delmotte: My teacher, Maurice Leclercq, advised me to enter for the Paris Conservatoire in 1944 and said to me: “You
are going to meet the Maestro Eugène Foveau, a great artist who is a soloist at the Paris Opéra. You will learn a lot from him.”
He was unknown to me because in those days we didn’t have all the information we have today.


T.C.: And you Pierre, when did you hear about Foveau for the first time?
Pierre Pollin: Mr Bellis, who was my teacher at the Conservatoire in Caen, knew him because he had sent him several students. He talked about him with great respect and admiration. He took me to Paris to introduce me to him. I also
remember hearing a few of the Master’s recordings on the radio.
Marcel Caens: My father knew Auguste Beghin who was solo cornet at the Garde Républicaine. He said to my father: “I’ll
introduce your son to Mr Foveau.” And that’s how I got to meet him.


T.C.: How did the first meeting go?
P.P.: It was in 1942 and I was 17. Nothing I played was to his liking. I had prepared 3 concertos: Fête joyeuse by Dallier,
Leboucher’s Concerto and Enesco’s Légende. He refused to hear them and asked me to play Alexandre Georges’s Légende
de l’Armor. Of course I complied, and played the concerto without any pleasure – because there was nothing brilliant to
play and it was too low and didn’t suit me at all. They failed me in 1942, although I had passed the first round. And then in
1943 I passed easily.
R.D.: The Légende de l’Armor was a set piece. Enesco was for the next round. I wondered how I was going to manage as I
did not know the piece.


T.C.: Was Enesco’s Légende never played outside Paris?
R.D.: It was not part of the curriculum in Roubaix or set for exams in the provinces. It was too difficult.

P.P.: After I got First Prize in Caen in 1941, Mr Bellis had introduced me to all the famous concertos of the time and helped me to study them, including the Légende. But we rather played Guy Ropartz, Pessard, Dallier, Chapuis, etc.


T.C.: What about the first time you met Foveau?
M.C.: I first met him at his place, rue Hélène. He gave me a lot of advice. I had not studied at any local conservatoire and
came straight from Villedieu in the Manche. I learnt the cornet with Michel Havard, an old man who played very well in the
old manner. He would tell me about people like Briens and Lachanau who were his contemporaries. I really learnt a lot
from him.


T.C.: What did Foveau particularly emphasize?
M.C.: As far as sonority and interpretation are concerned, I was in complete harmony with his own manner since I had learnt
from this Mr Beghin who belonged to the same school.


T.C.: What was the students’ standard when they arrived in Foveau’s class?
P.P.: You had to play scales very neatly. In 1943, during the war, the standard varied considerably, with a big gap between
the extremes.


T.C.: What did you study with him?
P.P.: Only Arban, Forestier, Chavannes.
M.C.: Ornaments, neatness and playing on the beat.


T.C.: What was his method?
M.C.: He insisted on style first, and breath control.
R.D.: He was very much influenced by opera singers, Georges Thill for example.
P.P.: There were two compulsory classes a week – three in theory, but I lived outside Paris.
M.C.: He would stop you the moment he thought it wasn’t neat enough.
P.P.: We didn’t play a lot of music: we had no training in endurance.
R.D.: For him, students never played neatly enough.
P.P.: He never talked about technical problems.
R.D.: Interpretation was the thing.
P.P.: The quality of the sound, the emission.
M.C.: The respect for legato, especially in Arban’s 6th.
P.P.: And he himself often set an example.


T.C.: What was the atmosphere like in his class?
M.C.: It was great! That was in the days of Menardi, Greffin, Mercier who was playing with the Air Force Band, Marius
Raynaud, Gibault, etc. I got second prize at the 1939 exam, even though Greffin and I came equal; he got benefit of age,
which was normal. In fact that setback was for my good because it enabled me, after I returned from Germany, to attend the Conservatoire again, to regain part of what I had lost during my years of captivity, and above all it gave me the opportunity to benefit from Foveau’s precious advice.
R.D.: How did you end up a prisoner in Germany, had you been called up for National Service?
M.C.: I had signed up in order to do my National Service as a musician. Then in 1939 the war interrupted my musical
activities for 4 years as I was a prisoner in Germany for 3 years.
R.D.: It was a good chance for you to resume trumpet-playing.
M.C.: Yes, they sent me directly to the trumpet class as the cornet class had been closed.
R.D.: Yes indeed, Vignal had died in 1943.
P.P.: Having got into the Conservatoire in 1943, we found ourselves together in Foveau’s class, and Roger joined us the
following year.
M.C.: It was very hard at first for my lips to work normally again. I had difficulty with high pitch – that was my weak point,
and it was a problem for playing Enesco.
R.D.: And concertos had evolved as well.
M.C.: I had the opportunity to go to Morocco and join the Orchestre de la Radio Française et de l’Opéra in Rabat. I stayed
there 8 years and then wanted to come back to France because of security problems. I then met André Amellèr during a
performance of Tristan und Isolde at the Paris Opéra. He had just been appointed Director of the Dijon Conservatoire and
he advised me to apply for the post of trumpet teacher. I was lucky to be appointed and began my teaching career. Ph.
Gaubert’s Cantabile & Scherzetto and Enesco’s Légende were set pieces. Foveau was on the Board of examiners and, after
the examination, made a few comments on my performance, including this remark: “I was afraid that you might have become
provincial’.” – I had left Paris 8 years before.
P.P.: He made just about the same comments to me in 1956 when he agreed to see me. I wanted his opinion on my abilities
at the time. After 4 years at the Orchestre de la Radio Française in Tunis followed by 4 years as a soloist at the Orchestre
de la Radio in Lille and as a teacher at Roubaix, I wanted to come back to Paris to apply for a post in one of the R.T.F.
orchestras. He then gave me a friendly welcome and I very much appreciated his warm compliments after I played to him – I
was eventually appointed soloist at the Orchestre Radio Lyrique.
R.D.: He was always very strict about purity of style. He always insisted on this and absolutely wanted us to play as a great
opera singer sings or a violinist plays. I have always tried to convey to my students the basic notion of controlling the air
column just as a violinist controls his bow – his favourite phrase was “the bow to the string”. He himself had studied the
violin.
P.P.: “The bow to the string”, that was his phrase.
M.C.: He often drew comparisons with the violin.
P.P.: As soon as I joined his class in 1943, I had some difficulty understanding what exactly he was after. He gave a lot of
examples which I tried to reproduce, like the other students. I had no problems with détaché, but I had to adapt it to the
desired interpretation. Thus thanks to his advice and his attentive listening, I think I eventually managed to master all forms of emission and détaché. He also taught me to control sonority by demanding perfect homogeneity from low to high pitch and good command of nuances and legato. As for style, interpretation and musicality, the examples he gave were perfect. So what had been so far mere imitation – for me and of course for others – gradually turned into a more personal style, but still inspired by what I had heard.
R.D.: I had to modify the emission which was too sharp and typical of trumpet players at the time, but I think the sound was
there. I had a hard time learning what interpretation on a trumpet meant.


T.C.: So you played your programme to him. What concerto did you play?
P.P.: I played set pieces by Gallois-Montbrun / Jolivet / Tomasi, the three in a row.


T.C.: And what did he say?
P.P.: He said I could come back to Paris and apply for a post as a soloist.


T.C.: Did he give explanations on how he played?
R.D.: We didn’t have enough experience to understand that at the time. You must remember that we had only been taught the
technical basics! If you played well, it was because you knew how to breathe correctly and you had the physical ability.
P.P.: It was difficult to understand his explanations but his examples were always remarkable.


T.C.: Do you mean that he never really explained anything?
R.D.: No. He himself had never had any problems, he played so naturally.


T.C.: And did he work a lot?
R.D.: One day he told us that periodically, he would play Gounod’s Ave Maria every morning. Every day he played it a half
tone higher. I was lucky to hear him play at the class. The sound and interpretation were so beautiful! There he didn’t have
the fears about high-pitched notes that he had at the Opéra or with Colonne. But then I think he was afraid of not doing well
in public. It would have hurt his pride.
M.C.: This reminds me of a phrase he had: “Raising one’s lip”. Whenever you had something high-pitched to play, it took
some time before you could begin to “raise your lip”, that is move your upper lip along the mouthpiece so that you could play
high-pitched notes. For example, he said he had to “raise his lip” when he played the Brandenburg.


T.C.: But did he have special physical abilities?
M.C.: They were not exceptional. Not like Maurice André’s for instance.
P.P.: Probably very much above average at the time though, before the evolution of the repertoire and Sabarich’s influence
then Maurice André’s.
R.D.: No, they were not comparable at all. Foveau was a cornet player before being a trumpet player, with some apprehensions about the instrument, I mean without the complete freedom of the uninhibited trumpeter. It is a well-known fact that the more you seek musicality, the less you can afford to play as if you didn’t think about it. There is no comparison. Is it better to take risks or not?


T.C.: One has to make a choice.
R.D.: You do make a choice and I opted for musicality. I called on him three weeks before he died. I was to play Jolivet
somewhere and wanted him to listen to me. He played the cadenza for me. It was perfect ! But then he said, “OK, I won’t
go any further.” He was about 70.


T.C.: Was he still playing at the end of his life?
R.D.: Just a few notes, but on very rare occasions.
P.P.: Was he still at the Opéra, when you got in?
R.D.: Yes, we worked together for a year, in 1951. I still remember when, at the end of Jeux d’enfants, he patted me on the knee with a friendly smile.
P.P.: It must have been a challenge to play
with the Master.
R.D.: Particularly as I had little experience in playing classical music in a big orchestra. I had played a lot of variety, music-hall and suchlike music to make a living. Fortunately I had played three months for the classical season in Cannes and had done a few concerts with Oubradous, which helped me a lot. And then I had worked differently for the preparation of the 1950 Geneva International Competition, in which I got First Prize. I had prepared it with the Master and I am still grateful to him