Rééditer un disque Foveau, pourquoi… ? par Thierry Caens.
Il s’agit bien sûr du 20ième siècle…
Je suis très heureux de contribuer, aujourd’hui, à la réédition en CD d’une partie du patrimoine musical d’Eugène Foveau. Ce projet, longtemps mûri, est devenu une évidence en 2005 lorsque j’ai fêté à Dijon mes 20 ans d’activités au Conservatoire National de Région (dans la Salle Foveau…). C’est aussi une aventure à la fois familiale, professionnelle, humaine qui a pris un sens particulier à la suite de ma nomination en 2003 au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Lyon, où j’ai réintégré l’étude obligatoire du cornet dans le cursus des études…
Mais tout d’abord revenons sur la genèse et sur les raisons qui m’ont amené à réaliser ce projet.
Lorsqu’on est trompettiste, fils de Marcel Caens, lui-même élève d’Eugène Foveau et qu’on est né à Dijon (ville natale de Foveau), cela fait 3 bonnes raisons d’être concerné par ce grand maître. Je peux dire que j’ai été élevé dans le culte de ce musicien tant l’influence qu’il a eu sur mon père a été présente.
Mais il y a bien d’autres raisons… Tout d’abord l’écoute des archives familiales (des disques en cire, qui constituent la base de cette réédition) que l’on écoutait religieusement à la maison ; mais aussi les anecdotes que mon père me racontait lorsqu’il évoquait ses années d’étude au CNSM avec Foveau, mais aussi et surtout par les conseils d’interprétation liés aux œuvres qu’il avait travaillées avec le maître et qu’il me faisait travailler à son tour ; cela concernait entre autres: Légende d’Enesco, Gaubert, Barat, Clergue, Chailleux, études Arban, Balay, Forestier et bien sûr l’Histoire du Soldat de Stravinsky (Foveau l’a d’ailleurs enregistré avec le compositeur, version de référence notamment concernant le fameux passage des « Quintolets » où Foveau insistait sur la régularité et l’obligation de le jouer staccato et non legato (exigé par Stravinsky !).
Foveau c’était un maître du style, de la musicalité, de la sobriété et je n’avais qu’à bien me tenir car là était la « vérité » transmise par mon père. J’ai été et suis toujours très impressionné et influencé par ce style que j’essaie à mon tour de transmettre, forcément superposé à ma personnalité et aux diverses influences rencontrées.
Parmi celles-ci j’eu le privilège d’entrer au CNSM de Paris dans la classe de Maurice André (le trompettiste du 20ème siècle) et par lui que j’admirais par-dessus tout, je rencontrais l’influence d’un autre grand maître que fut Raymond Sabarich (son maître), personnalité brillante et démonstrative, au style radicalement différent. Avec mon maître je rencontrais les autres grands du moment Marcel Lagorce, Pierre Thibaud, Bernard Jeannoutot, Yves Coueffé, Francis Hardy… tous élèves de Sabarich. Mais l’aventure Foveau n’était pas terminée pour moi ! Après l’étude de la respiration et du corps avec Robert Pichaureau (à qui je dois beaucoup) je quittais Dijon pour étudier avec Pierre Pollin. Trompette solo de l’Orchestre National de France, ami et étudiant de la génération de mon père, il fut celui qui me fit passer de « bon élève de province » à « candidat au CNSM ». Elève de Foveau donc, il continua, avec sa personnalité (discrète mais déterminée) à me guider sur les traces du maître. J’étais heureux et impressionné de côtoyer celui que j’écoutais et regardais tous les dimanche à la télévision dans les magnifiques concerts du « National » (oui, le dimanche vers midi…).
Par la suite, comme un hasard, j’eu la chance d’entrer à l’Opéra de Paris au poste de Cornet solo, aux côtés de Roger Delmotte, le grand maître qui m’a tant fait rêver, avec Pierre Cochereau ou par ses enregistrements nombreux et extraordinaires à Radio-France. Il était élève de Foveau (de quelques mois plus jeune que P.Pollin et M.Caens) et était un soliste recherché et respecté ; il était juste avant et avec Maurice André celui qui fit de la trompette un instrument soliste reconnu. Quelle chance de pouvoir écouter et jouer à ses côtés dans la fosse de l’Opéra, j’appris beaucoup, sur la musique, le travail d’orchestre et le comportement…
Il y a, dans la jeune génération, un trompettiste au talent immense (que je considère comme « le trompettiste du XXIième siècle ») : David Guerrier. Très curieux et féru de recherches musicologiques et d’authenticité, il y a dans la sobriété et l’élégance de son jeu (notamment dans l’absence de vibrato), quelque chose qui me fait penser à Foveau ; mais peut-être est-ce les premiers symptômes de la « Foveaumania » dont je suis atteint…
Voilà toutes les raisons qui m’ont amené à mettre en chantier ce CD, à fixer ce patrimoine musical destiné aux générations futures et à réunir ces trois jeunes trompettistes pleins de talent qui ont tellement compté pour moi…
Why reissue a Foveau recording?
Eugène Foveau was the cornet player of the 20th century. I am very happy to bring my contribution to the present release in
CD form of part of Foveau’s musical heritage. This long-nurtured project became a necessity in 2005 when I celebrated my
twenty-year teaching activity at the Dijon Conservatoire National de Région – in the Foveau room. The undertaking also has
personal, professional and human reasons, and acquired a very particular meaning in 2003 with my appointment at the Lyons
Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse, where I decided to reintroduce the compulsory study of the cornet
into the curriculum.
Let me first explain the origin of the project and why I wanted to carry it out. Being a trumpet player whose father Marcel Caens studied with Eugène Foveau, and being born in Dijon – Foveau’s native town – are in themselves good enough reasons to have a special interest in such a great master. Let me say for a start that his influence on my father was so great that I was brought up in the cult of this musician.
Orchestre National de France and helped me reach theAfter perfecting my knowledge of the body and breathing technique with Robert Pichaureau – to whom I am greatly indebted – I left Dijon to study with Pierre Pollin. A friend and fellow student of my father’s, he was solo trumpet at the standard to become a CNSM student. He himself had studied with Foveau and, with his discreet though determined personality, he guided me along the same line. I was happy and impressed to learn from the man I used to watch every Sunday on television during the superb lunchtime concerts of the “National”.
Later on, as luck would have it, I was fortunate enough to be
appointed solo cornet at the Paris Opéra, playing with Roger
Delmotte, the great trumpet player who had so often impressed
me in concert with Pierre Cochereau or by his numerous superb
recordings at Radio-France. A little younger than Pierre Pollin
and Marcel Caens, he had also studied with Foveau and was
a respected and much sought-after soloist. He and Maurice
André after him made the trumpet a fully recognized solo
instrument. I had the privilege of listening to him and playing
with him at the Opéra, where I learnt a lot about orchestral
music, work and behaviour.
This is why I wanted to produce this CD, to keep this musical
heritage for future generations and bring together the three
highly-talented trumpet players who have meant so much for me.